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1 novembre 2010 1 01 /11 /novembre /2010 17:58

american darling banks Hannah Musgrave a 59 ans quand elle décide de retourner en Afrique pour savoir ce que sont devenus ses fils. Cette fermière, qui vit seule entourée de ses employées, a en effet derrière elle une vie bien remplie, qu’elle s’emploie à dissimuler.

 

Dans les années 1970, bien qu’issue d’une famille aisée et fille d’un psychologue pour enfant très connu, Hannah était une révolutionnaire. Elle a fait partie de The Weather Underground, un groupe projetant de réaliser des attentats sur le sol des Etats-Unis. Repérée et condamnée par contumace, elle finira par trouver refuge en Afrique, poussée par son ami Zack. Elle atterrira d’abord au Ghana, puis elle finira par tenter de reconstruire sa vie seule au Liberia.

 

Ce petit pays est peu connu. Sa création date du XIXème siècle. Après l’abolition de l’esclavage aux Etats-Unis, ce bout de terre a été “offert” aux anciens esclaves pour qu’ils retournent en Afrique, avec tous les problèmes que cela peut entraîner.

 

Hannah est d’abord recrutée par un laboratoire américain. Son travail consiste à réaliser des tests sur des chimpanzés, dont elle envoie les résultats aux Etats-Unis. Ce sera son premier contact avec ses “rêveurs”. Elle finira même par créé un centre d’accueil pour ces êtres qui la fascinent, mais qui au Liberia constituent une nourriture rare et appréciée.

C’est aussi par ce travail qu’elle rencontrera le Docteur Woodrow Sundiata, petit ministre promis à un  avenir politique, qui deviendra son mari et le père de ses trois enfants. Elle vivra des moments heureux avec lui, ainsi que des moments de grande incompréhension. Car si Hannah représente son côté “occidental”, il reste fortement attaché à son clan et à ses traditions.

 

Malgré tout leurs efforts pour être heureux, Hannah et sa famille seront rattrapées par l’Histoire. Et celle du Liberia passe par de grands moments de chaos et de violence…

 

*****

 

Il est difficile de résumer ce roman sans en affadir le contenu. Russel Banks a écrit là une œuvre de haut vol, qui place au cœur d’évènements réels et fictifs une héroïne passionnante.

 

Hannah est en effet un personnage comme on en voit rarement. Complexe et ambigüe, elle est difficile à saisir.

Une fois, elle sera révolutionnaire prête à mettre la société à terre, alors qu’au Liberia, elle sera femme bourgeoise et mère de famille. Elle se laissera porter par les évènements, comme elle insistera auprès du président libérien pour obtenir son centre de protection des chimpanzés. Autant elle laissera ses enfants aux mains de la femme de service, autant elle veillera à ce qu’ils grandissent bien. Froide voire glaciale par moment, elle apportera un soutien sans faille à son mari.

Cette complexité viendra aussi du fait que sa dureté envers le genre humain est compensée par un respect profond pour les chimpanzés.

Ce personnage, qui pourrait être si antipathique, ne peut laisser indifférent. Pour ma part, elle m’inspire même une certaine sympathie par son engagement total dans des causes, son honnêteté envers elle-même et la compassion qu’elle inspire.

 

Ce roman de Russel Banks est aussi un témoignage sur une partie de l’histoire de Etats-Unis, mais surtout sur celle du Liberia. Ce pays, né en 1822, fondée sur une idée qui peut paraître généreuse, a aussi été le premier d’Afrique à obtenir son indépendance en 1847. Pourtant, c’est un pays en proie à la violence, à la ségrégation et à la domination étrangère. C’est une période trouble de son histoire que nous fait découvrir Russel Banks, où les meurtres, les viols et les pillages ont été commis en grands nombres.

Il est triste de constater qu’aujourd’hui, on en entend parler uniquement quand Naomi Campbell vient témoigner au procès de Charles Taylor (qu’Hannah rencontre d’ailleurs) au sujet des Diamants de sang.

 

Quand la fiction raconte de tels évènements, à travers le regard d’un personnage fascinant, je crois que l’on peut parler d’une grande réussite. Et dans tous les cas, American Darling interpellera forcément le lecteur.

 

Plein d’autres avis sur Blog-O-Book.

 

American Darling / Russell Banks ; trad. de l’américain par Pierre Furlan. – Actes Sud, 2005.

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commentaires

N
<br /> <br /> Ce roman est exceptionnel, très riche, et d'une belle plume. Il révèle une partie de l'histoire africaine souvent méconnue!<br /> <br /> <br /> Je te conseille en effet Sous le règne de Bones, un chouette roman mais beaucoup plus léger!<br /> <br /> <br /> <br />
R
<br /> <br /> Sous le règne de Bones est tout en haut de ma liste de livres à lire ! Il faut juste que je trouve le temps. Merci pour ce conseil !<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> <br /> J'ai renoncé à lire cet auteur certes de qualité, mais vraiment pas pour moi !<br /> <br /> <br /> <br />
I
<br /> <br /> Tu l'as parfaitement souligné : une des forces de ce roman c'est qu'on s'intéresse (qu'on s'identifie même) à ce personnage qui souvent est loin d'être sympathique.<br /> <br /> <br /> Ma première rencontre avec Russell Banks, une vraie découverte.<br /> <br /> <br /> <br />
R
<br /> <br /> Première rencontre avec Russell Banks pour moi aussi. Et effectivement, ce roman marque. Du coup, j'ajoute à ma liste de livres à lire Sous le règne de Bones, qui est sorti en Babel J il<br /> y a quelques temps...<br /> <br /> <br /> <br />