C'est sur le blog de Cathulu (qui
parlait de la suite de ce livre, Les veuves d'eastwick) que j'ai découvert qu'avant d'être un film, le titre Les sorcières d'Eastwick avait été un livre. Du coup, je me suis
plongé dedans.
J'avais en tête la version cinématographique de George Miller, avec un Jack Nicholson ébouriffant et le trio Cher, Susan Sarandon et Michelle Pfeiffer. Autant vous dire tout de suite que mes
souvenirs ne correspondent que très peu avec le livre.
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Soit donc trois amies, Sukie, Jane et Alexandra. Les trois femmes sont des sorcières, qui ont vu leur pouvoir augmenter à Eastwick et surtout après leur divorce. Elles en ont d'ailleurs
profité pour transformer leur mari en objet divers.
Tous les jeudi soirs, elles se réunissent. Leurs pouvoirs sont alors à leur apogée et elles en profitent pour jouer des tours aux gens "bien-pensants" d'Eastwick. Mais elles savent, elles, que
derrière les apparences la réalité est moins belle. Car elles sont les amantes et les confidentes d'hommes mariées. Sorcières et amantes, autant dire que les femmes de la ville ne les portent pas
dans leur coeur.
Un jour, arrive en ville un homme étrange, précédé de beaucoup de rumeur. Il serait un scientifique, viendrait de New-York et possèderait une fortune immense. Cela semble confirmé par le fait
qu'il fait rénover à grand frais une demeure gigantesque mais délabrée. Cet homme, c'est Daryl von Horne.
Fascinées ce drôle de personnage, les trois amies vont faire sa connaissance à tour de rôle, avant de le rencontrer chez lui toute ensemble. Elles vont alors laisser parler leurs désirs et leurs
fantasmes. Une belle mécanique va se mettre en place à partir de ce moment.
Elle va cependant se gripper à l'arrivée de deux nouvelles personnes à Eastwick, Jenny et son frère Chris. Ceux-ci sont les enfants du dernier amant de Sukie qui, dans un moment de folie, tuera
sa femme avant de se pendre. Un peu par remord, Jenny sera introduite dans leur cercle. Ce geste signifiera la fin et le début de la chute.
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Autant le dire tout de suite, si j'ai bien aimé ce livre, je n'ai aucune empathie pour les trois héroïnes. Quand l'introduction parle de "l'émancipation de l'individu - notamment
de la femme", je ne vois que des femmes certes libres mais en partie amères, qui n'utilisent leurs pouvoirs que pour des choses négatives. Le terme de sorcières leur convient
parfaitement, malgré quelques soupçons de regrets pour Alexandra.
En revanche, le personnage de Daryl von Horne est fascinant. Jack Nicholson est bien sûr pour beaucoup dans l'image que j'ai de lui (encore que la fin du film n'a rien à voir du
tout avec le livre). John Updike arrive cependant par de nombreux petits détails à donner une image non-humaine de ce personnage (ce prénom que personne ne retient, cette peau blanche...). Dans
ses actes, il arrive, sans que cela se voit, à "casser" le positif de nos trois sorcières. Alexandra ne fait plus de Ninouches, des petites statuettes pleine de féminité, Jane devient violente
dans sa manière de jouer de la musique... Et puis le comportement de Daryl avec Jenny poussera Jane, Sukie et Alexandra à agir de manière définitive. Nous le voyons peu, n'avons jamais son point
de vue, mais il est la clé du récit.
Au-delà des personnages, je ne puis que dire que je ne suis pas insensible au style de John Updike. Ses longs paragraphes m'ont vraiment séduit. Et puis il décrit si bien cette
frange de la population middle-class des Etats-Unis, où derrière les apparences la réalité est beaucoup plus sombre. En simplifiant à l'extrême, c'est Desperate Housewives avec un zeste
de Harry Potter.
Un roman riche et intéressant, qui dans tous les cas ne m'a pas laissé insensible.
Malgré tout, je me demande si je ne suis pas passé à côté de quelque chose, quand je lis les avis d'Abige, de Camille G. et de Mango.
Les sorcières d'Eastwick / John Updike ; trad. de l'anglais par Maurice Rambaud. - Gallimard, 1986. - Collection Folio.